Renoir, pastels, crayons et sanguines

Les amis et artistes impressionnistes ont eux-mêmes témoigné de cette importance. Ainsi, Berthe Morisot note dans l’un de ses carnets, au 11 janvier 1886 : « Visite chez Renoir. Sur un chevalet, dessin au crayon rouge et à la craie d’après une jeune mère allaitant son enfant ; charmant de grâce et de finesse. Comme je l’admirais, il m’en a montré une série d’après le même modèle et, à peu de choses près, dans le même mouvement. C’est un dessinateur de première force ; toutes ces études préparatoires pour un tableau seraient curieuses à montrer au public qui s’imagine généralement que les impressionnistes travaillent avec la plus grande désinvolture. Je ne crois pas qu’on puisse aller plus loin dans le rendu de la forme, deux dessins de femmes nues entrant dans la mer me charment au même point que ceux d’Ingres ».

Les différentes approches du dessin, de la note prise sur le vif, en plein air, au portrait détaillé, au pastel de couleur, achevé comme un tableau, témoignent à la fois de la diversité des pratiques de l’artiste comme de sa constante volonté d’expérimentation.

Plus qu’aucun autre, parmi les Impressionnistes, il est celui qui regarda les maîtres et porta une attention particulière au dessin. Comprendre le rôle que joua le dessin dans son œuvre, tenter de restituer une chronologie et une évolution, en parallèle à l’œuvre peint, paraît indispensable à une compréhension de l’ensemble de son travail. Autant que Degas, Renoir fut un dessinateur. Par cette pratique, il s’inscrit à la fois dans une tradition, et la renouvelle par son approche expérimentale. Cette particularité au sein du groupe mérite d’être soulignée, et envisagée dans sa richesse.